Découvrez le témoignage de Patricia Hureau, comédienne clown au Rire Médecin en hospitalisation à domicile

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Un enfant qui arrive à l’hôpital se doit de rester un enfant. Il se doit de rire, jouer, rêver… Mais tout cela est mis à mal dans ce lieu inconnu, anonyme et où papa et maman sont anxieux, où des dizaines de personnes entrent tour à tour sans que l’enfant ne les connaisse et sache ce qu’il va se passer. Nous, les Clowns, devenons tour à tour, ceux qui sont plus bas, ceux qui échouent, ceux qui en-chantent, ceux qui font de la magie, ceux qui emmènent dans des contrées lointaines, ceux qui remettent de la couleur sur les murs, ceux sur qui on peut se défouler, ceux à qui on peut dire non, celui ou celle avec qui on peut s’allier contre l’autre qui est vraiment bête, ceux qui ont fait rire maman qui n’a pas ri depuis quelque temps, ceux qui passent un jour et reviennent les autres jours, ceux qui savent faire des bêtises que l’enfant ne fait plus car il est à l’hôpital, ceux qui viennent faire un jeu tout doux quand l’enfant est très fatigué, ceux que l’enfant peut regarder sans participer, ceux qui font de la musique dans les couloirs, ceux qui sont des vrais clowns et que l’enfant aime et les autres, ceux qui ont laissé leur carte ou un nez, ce qui permet de raconter à Maman comment on a joué, ceux qui ont embêté Papa, lui qui est si fort et que l’enfant admire.

Depuis environ 3 ans, nous allons aussi chez les enfants qui peuvent bénéficier de l’HAD (hospitalisation à domicile). C’est-à-dire qu’ils sont toujours en soin, mais qu’il y a possibilité de rentrer à la maison et bénéficier de visites à domicile. On rentre dans leur intimité avec la complicité de la puéricultrice que nous accompagnons et c’est encore plus « sur un fil ». On doit tout de suite sentir la météo de l’univers dans lequel nous rentrons, trouver une place juste car on est trois à rentrer. Être juste au niveau sonore, car on passe du bébé prématuré qui vient juste de rentrer pour la première fois dans son cocon, à l’enfant qui nous emmène dans une chambre pleine de vécus de plusieurs années de vie. Il y a aussi cette maman, de culture différente, et qui ne sait même pas ce que c’est un clown et qui nous a préparé une montagne de gâteaux pour nous accueillir ou cet autre garçon de 5 ans qui nous attend dans le dortoir de son école maternelle pour son soin et qui nous attrape fièrement la main en disant à ses camarades:

« C’est mes Clowns ! » ou cette jolie jeune fille qui doit avoir son soin dans une caravane minuscule dans un camp. C’est un voyage incroyable ! Et puis, il y a la rencontre avec une puéricultrice qui nous fait une transmission détaillée : la pathologie, l’état, l’humeur, la durée du soin, les précautions à prendre, et comment l’on procède pour l’entrée et la sortie. Souvent, nous rentrons après la puéricultrice, le soin est prioritaire et doit se passer au mieux : ici on fera tout doux devant ces grands yeux qui nous croquent du regard, là on fera une course poursuite dans la maison avec ce garçon qui nous poursuit comme Batman et gagne à chaque fois et puis quand vient le moment du soin, les marionnettes, les chansons, les ukulélés pointent leur bout du nez et le petit castelet s’installe et puis le soin fini, l’action peut reprendre. Quelquefois, c’est difficile de se séparer alors on peut laisser une petite carte, un nez, comme un objet transitionnel qui laisse une trace de notre passage.

Quelquefois, on part avant, laissant la puéricultrice en conversation sérieuse avec maman et on se réfugie dans la voiture, notre loge. Le temps est différent en HAD, les visites peuvent durer une heure. L’HAD, c’est très concret, très immédiat, dans le présent absolu du moment. Nous sommes juste une parenthèse pour souffler sur ces braises si la flamme vacille ou si le feu se tarit. Je suis à ma place.

 

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