Il y a 25 ans, le monde a fait une promesse aux enfants avec la signature de la Convention Internationale des Droits de l'enfant, adoptée par les Nations Unies en 1989. En cet anniversaire, rappelons que ce texte fondateur met aussi en avant le droit de jouer pour le bon développement de chaque enfant.

Comme l'avait déjà fait la charte de l'enfant hospitalisé un an plus tôt. Découvrez pourquoi le jeu est une affaire si sérieuse, notamment lors d'une hospitalisation.

Les Etats parties reconnaissent à l’enfant le droit au repos et aux loisirs, de se livrer au jeu et à des activités récréatives propres à son âge et de participer librement à la vie culturelle et artistique*

« Tu seras le cow-boy et moi l’indien ! », « On se fait un ballon prisonnier ? », « Une petite partie ? » ; autant de propositions familières qui nous ramènent aux joies d’enfance. Pourtant, dans notre monde de « grands », le jeu est trop souvent vu comme un luxe accessoire. Jouer n’est pas une activité immédiatement productive croyons-nous, et nous avons tendance à en oublier la valeur inestimable. Universellement et dans toutes les cultures, le jeu constitue cependant l’architecture de notre développement affectif, psychique, moteur et social, dès nos premières semaines. Son rôle est d’autant plus riche quand l’épreuve de l’hospitalisation en entrave l’accès ou le goût. Avec les clowns, le jeu peut redevenir une source infinie d’harmonie, pour les petits, mais aussi pour les adultes qui les entourent.

« Je me souviens du regard si intense de Maya, une adorable bouille de 5 mois. Elle avait passé ces premiers mois uniquement à l'hôpital. Mon partenaire et moi avons commencé des vocalises pour établir le contact. D’un coup, son regard m'a attrapée ! Quelqu’un l’écoutait, et lui répondait. Il y avait un mélange entre le plaisir fou qu’elle prenait à gazouiller et l'urgence d’échanger, alors j'ai écouté. Quel plaisir d'entendre, de voir, de partager ces premiers sons. ». Ce plaisir du babillage avec Pauline Réant, notre clown Sousixe, illustre la nécessité du jeu dans la construction mentale des nourrissons.

Jusqu’à 3 ans, les sons, le mouvement, la couleur, exacerbés par ces jeux sensoriels, permettent à l’enfant de mesurer les aptitudes de son corps par rapport à son environnement et d’évaluer l’influence qu’il peut avoir sur lui et sur son entourage. C’est le premier pas vers l’imaginaire, qui naît de la confrontation avec le réel.

De 3 à 6 ans, ce recours au monde imaginaire prend toute sa dimension. C’est l’ère formidable des jeux de représentation, le royaume de la transgression possible par la créativité. Le jeu donne du pouvoir à l’enfant. Il lui permet d'éprouver et de maîtriser ses ressources inconscientes.

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A travers le jeu, il exprime sentiments, craintes, rancunes, agressivité, enthousiasmes, conflits. Témoin ce petit garçon qui fait crier à son nounours un « Je n’ai pas faim ! » d’une voix de Stentor pour exprimer son propre refus devant le bol tendu par sa mère. Le « faire semblant » est à son apogée. En « imitant » ses parents ou en incarnant successivement le Prince, le monstre ou le lapin de l’histoire, il étend ses perspectives intérieures et développe ses facultés à appréhender, plus tard, des situations qu’il n’aura pas lui-même éprouvées. C’est la fin du « tout moi », le début de la compétence sociale.

A partir de 7 ans et jusqu’à la préadolescence, l’appartenance à un groupe prend de l’envergure et se traduit par des jeux où la formalisation, la « règle », s’impose peu à peu, pour entrer en relation avec autrui. Les jeux de représentation symbolique (imitation de personnes de l’entourage) sont progressivement remplacés par des jeux de fiction totale (« Je suis une grande chanteuse et je passe à la télévision ») et par des jeux de société ou de « bandes », avec une logique propre de groupe.

Loin d’écraser l’imagination, la règle stimule la créativité ; elle permet à l’enfant de faire des choix guidés par l’anticipation du déroulement du jeu : « Au ballon prisonnier, dois-je libérer mon coéquipier, ou éliminer mon adversaire ? ».

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L’adolescence voit ces jeux de tactique se conforter encore. C’est le summum de l’envie d’adhérer à un modèle social incarné par le groupe. La dérive, à cet âge, peut être aussi la nécessité de transgresser pour être accepté par ses pairs. Montrer sa résistance à la douleur, se confronter au bras de fer, flirter avec les limites de son corps comme autant de rites d’initiation sont communs à cet âge.

Le jeu correspond alors parfaitement à la formule du psychologue Jean Château, dans Le jeu et l’enfant, paru en 1950, c’est « une épreuve et une preuve de ce que l’enfant est lui-même ».

Le jeu est indissociable du développement harmonieux de chacun. Il est donc vital que nous continuions de le chérir, et que nous y retournions plus souvent, même passés 16 ans !

*Extrait de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant

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